Face au palais de justice, le dos au rivage où la mer est en tempête, les fidèles ne sont pas moins en colère. Les slogans sont violents, à la mesure du vent, qui secoue rudement les trois pantins représentant Muammar al-Kadhafi accrochés à des potences. «Le sang des martyrs ne sera pas versé en vain», scande la foule enveloppée de bruine et de drapeaux. Puis, «Kadhafi, tu tomberas aujourd'hui» ou «Allah, le Prophète, la Libye et c'est tout», ou encore «Kadhafi, tu es un agent étranger, rentre en Israël ou chez ta mère [une rumeur prétend que la mère du dictateur est à moitié juive, ndlr].»
Pour cette première prière du vendredi depuis la libération de Benghazi, qui a réuni plusieurs milliers de personnes, le palais de justice a remplacé la mosquée. Le prêche du mollah n’en est pas moins rageur. A l’intérieur de l’immeuble, s’est établi le nouveau conseil municipal qui a pris en main la ville. C’est en fait un petit gouvernement de quinze membres, essentiellement des avocats, des juges, des universitaires, des médecins et certains des jeunes qui ont été le moteur de la révolution. Il y a de véritables contrastes entre ce comité créé ces derniers jours, composé de personnes pondérées, réfléchies, qui ont pris acte de la vacance du pouvoir, et la foule que l’imam chauffe par son sermon.
«Nous partons de rien». Chaque ville libyenne «libérée» est dirigée par un comité public semblable, en totale indépendance. Aucune coordinatio