Secrétaire générale de la Fédération internationale des droits de l’homme, Khadija Cherif est une féministe tunisienne qui, depuis plus de vingt ans, se bat pour la défense des libertés individuelles. Elle revient sur la position française à l’égard de la Tunisie.
Vous attendiez le départ de Michèle Alliot-Marie?
Sincèrement, oui. Les informations s'accumulaient et les révélations se multipliaient depuis plus d'un mois, il devenait difficile pour Mme Alliot-Marie de rester ministre des Affaires étrangères. Elle était déstabilisée et avait perdu toute crédibilité.
Qu’est-ce que vous lui reprochez par-dessus tout ?
Il y a bien sûr ses mensonges sur ses voyages en avion payés par l'homme d'affaires Aziz Miled et ses échanges avec le clan Ben Ali alors que le pays manifestait contre la dictature. Mais ce sont ses propos à l'Assemblée nationale [le 11 janvier, ndlr] qui m'ont le plus choquée, quand elle a proposé les services de la France aux forces de sécurité tunisiennes afin qu'elles rétablissent l'ordre. Elle a dit cela au moment où la police tirait sur une foule pacifique, qui exprimait des revendications légitimes et demandait plus de libertés. Quel aveuglement. Ces déclarations d'un ministre français ont choqué tous les Tunisiens. Mais en fait, depuis plusieurs années, c'est la politique de complicité de la France avec le régime Ben Ali qui est choquante. Déjà, en 2008, Nicolas Sarkozy affirmait que «l'espace des libertés progressait en Tunisie», fermant les yeux sur la révolte sociale du bassin minier de Gafsa, durement réprimée par Ben Ali. Ce