«De temps en temps, il faut avaler son chapeau dans ce métier», avait lancé Bernard Kouchner en décembre 2007, juste avant la visite de Kadhafi à Paris. Tout au long des quelque trois ans et demi passés à la tête du quai d'Orsay, l'ex-«French doctor» mis devant les faits accomplis d'une politique étrangère pilotée depuis l'Elysée dut effectivement avaler pas mal de couleuvres. C'est cette mainmise qu'a voulu éviter à tout prix Alain Juppé à qui, déjà, fut proposé le poste lors du précédent remaniement, en novembre dernier.
Cette fois, face à un président affaibli et conscient de l'urgence de redonner une crédibilité à la diplomatie française prise à contre-pied par le «printemps arabe», le maire de Bordeaux a pu imposer ses conditions. Il sera pleinement le ministre des Affaires étrangères, même si celles-ci, sous la Ve République, reste le domaine réservé du chef de l'Etat, comme s'est empressé de le rappeler hier, sur France Inter, Henri Guaino, conseiller spécial du chef de l'Etat. «Ce n'est pas une coïncidence si les seuls titulaires du quai d'Orsay à avoir pu prendre une véritable dimension furent aux manettes pendant des cohabitations», remarque un diplomate. Ce fut le cas d'Hubert Védrine au sein du gouvernement de Lionel Jospin (entre 1997 et 2002). Et auparavant, d'Alain Juppé, déjà, entre 1993 et 1995, sous le gouvernement d'Edouard Balladur.
Le maire de Bordeaux semble avoir la voie libre. Certes, nul ne connaît encore avec certitude que