Premier passage du Sukhoï, très haut au-dessus de Ras Lanouf. Panique et pagaille. Les mitrailleuses criblent le ciel, à tâtons, sans rien voir. Des combattants s'enfuient, d'autres hurlent «Allah akbar», l'un d'eux se plante au milieu de la route en brandissant une baïonnette contre l'avion, haut dans le ciel. D'autres encore tirent avec tout ce qu'ils ont entre les mains, tapissant le sol de douilles. Second passage : cette fois, l'appareil est très bas. Les rebelles reprennent le feu. Les «Allah akbar» fusent de plus belle. Subitement, le Sukhoï n'est plus dans le ciel. Une explosion dans le désert. Les mitrailleurs, qui n'ont eu qu'une ou deux journées de formation militaire, viennent d'abattre, samedi après-midi, leur premier avion. Le premier jamais atteint par la rébellion.
L’appareil a été déchiqueté, mais il n’a pas brûlé. Sur les corps des deux pilotes, les papiers militaires permettent de savoir leur nationalité : l’un est libyen, l’autre soudanais, première preuve flagrante que l’armée de Kadhafi fait appel à des mercenaires. Chez les rebelles, l’exaltation est d’autant plus à son comble que leur colonne a progressé d’environ 150 kilomètres depuis vendredi. Ras Lanouf, le plus important terminal pétrolier de Libye, est sous leur contrôle.
Fer de lance.«Nous ne voulons pas pousser jusqu'à Syrte», déclarait hier matin le commandant Bachir Abdelkader al-Maghrebi, un ancien officier des forces spéciales, la garde prétorienne