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Libération
Reportage

A Zarzis, passoire à passeurs

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Ce petit port tunisien est un haut lieu de la migration clandestine vers l’Europe. Tarif: 1000 euros pour une traversée dans des conditions souvent précaires.
Sur la côte tunisienne, à Zarzis, le 18 février. (REUTERS)
publié le 8 mars 2011 à 0h00
(mis à jour le 9 mars 2011 à 11h11)

Le sardinier en bois de 17 mètres, commandé par Raouf, jeune chef mécano de 22 ans, chasse sur son ancre à 300 mètres du rivage du petit port de pêche d'Ogla, à deux kilomètres à l'ouest de Zarzis, ville de 140 000 habitants située à 45 km de Djerba. Mais il n'y aura pas de départ cette nuit pour Lampedusa : «On n'a pas notre compte. Il manque encore une dizaine de candidats pour rentrer dans nos frais», veut croire le passeur qui dit s'appeler Ahmed. Il lui manque les phalanges de la main droite, coupées par une machine à bois : «Pour les journalistes, je demande 2 000 euros», annonce-t-il. Il s'enorgueillit d'avoir fait passer «deux Allemands» mercredi. C'est ici, à Ogla, ce petit port de mouillage avec ses belles villas mauresques louées dès mai aux touristes, que partent les sardiniers en bois chargés de harraga (clandestins), vers l'île italienne de Lampedusa. Huit petites embarcations gouachées d'un bleu passé dansent sous un ciel azur. Certaines ont été vidées de leurs filets en prévision des «navettes» vers «le gros bateau». «On ratisse jusque dans la campagne, mais il y a moins de candidats. Je fixe mon prix car je suis le seul à savoir faire marcher un bateau», se rengorge Raouf, le jeune mécano, qui en est à son «troisième passage» depuis un mois. Et ensuite ? Les candidats au départ sont hissés à bord du chalutier, dont il assure qu'il possède tous les instruments de navigation. Comme les odeurs d'hui