Ces derniers mois, alors que la Hongrie assure la présidence de l’Union européenne, la promulgation par le gouvernement de Viktor Orbán d’une «loi sur les médias» instaurant un pouvoir discrétionnaire sur l’opinion a suscité une large indignation internationale. La dénonciation du triste spectacle donné par l’UE, incapable de contraindre l’un de ses membres au respect de ses principes fondateurs, s’est parfois teintée de condescendance à l’égard de ces «nouveaux entrants», formule qui semble porter un peu trop facilement leurs errances au compte d’une sorte de péché de jeunesse, ou de marginalité européenne.
Ce serait oublier que depuis le siècle des Lumières, une part du sens et du destin de l'Europe se joue dans le sort réservé à la Mitteleuropa. Ce serait négliger, aussi, que cette loi inique fait corps en Hongrie avec une vaste entreprise de transformation des structures démocratiques, visant à éroder les garde-fous de l'Etat de droit, et avec une offensive non moins violente de stigmatisation et d'intimidation des adversaires de l'actuel pouvoir. Admirateur de Silvio Berlusconi, Viktor Orbán s'arroge autant de libertés avec la Constitution (il a fait procéder à plus de dix révisions en un an, dépossédant le Tribunal constitutionnel de ses droits et restreignant le principe de séparation des pouvoirs), qu'il fait preuve de tolérance à l'égard de la presse d'extrême droite, lorsque celle-ci vilipende en termes crus l'homosexualité et les origines juives du directe