Hier matin, lors d’une allocution télévisuelle, l’empereur Akihito est sorti du silence pour adresser à la nation un message de soutien en forme de prière. Le décor est dépouillé, le dispositif minimal, l’instant solennel. Un petit homme aux cheveux gris, costume sombre et cravate perle, assis de face, le dos droit, s’incline lentement, saisit sa feuille et lit pendant cinq minutes et cinquante secondes.
L’absence de décorum et la brièveté du discours ne sauraient faire oublier qu’il s’agit là d’un événement exceptionnel : l’empereur Akihito, ce petit homme aux cheveux gris, n’est pas n’importe quel monarque mais un être d’ascendance divine ; sa parole est sacrée, et rare - traditionnellement réservée aux vœux à la nation lors du nouvel an japonais. Cette seule prise de parole télévisuelle suffit donc à donner une idée du regard que le Japon porte sur sa situation : seul un tel malheur national justifie une telle manifestation publique - en guise de comparaison, on se souvient, a contrario, que l’empereur avait gardé le silence lors du séisme de Kobe (1995).
En outre, tout se passe comme si la seule apparition du corps sacré de l'empereur suffisait, n'appelait guère grand-chose de plus : le contenu du message impérial est une prière d'une sobriété et d'une dignité extrêmes, l'empereur déclarant ainsi qu'il priait «pour la sécurité du plus grand nombre». Se crée alors un écho troublant avec l'autre allocution célèbre d'un autre empereur nippon, celle que fit Hirohito a