Que faisais-tu
quand la terre a tremblé
au Japon?
J’étais dans ma chambre
à ne rien faire.
Tout semblait enfin si calme autour de moi.
Soudain les éléments déchaînés
à l’autre bout du monde :
l’eau, le feu, la terre et l’air radioactif.
Ne manque que le vent pour emporter
ces îles ailleurs.
Les petits avions flottant.
Les camions poids lourds qui tanguent.
On dirait des mégots
dans un cendrier rempli d’eau sale.
Un paysage noyé effraie
mais n’émeut pas.
Seule la mort d’un être humain
parvient vraiment à toucher le cœur d’un autre.
Cette jeune fille drapée de jaune
que des photographes insouciants ont changée
en mater dolorosa
est devenue l’arbre qui cache le paysage dévasté
et les corps gonflés d’eau.
J’entends murmurer mon vieux maître Bashô :
«Regarde, regarde,
les vraies fleurs
de ce monde de souffrance.»
Qui, parmi nous, peut
ressentir une si insoutenable douceur ?
Est-on obligé de pleurer
quand celui qui vit le drame
fait ce qu’il peut
pour ne pas perdre la face ?
Le Japon garde tout
au plus profond de lui-même.
Gare à l’implosion.
Ces images sautillantes captées
par les caméras de sécurité installées
dans les immeubles de la ville
sont gorgées d’émotion.
Tétanisé par ces images qui montrent
les gens se dépêchant de quitter le bureau.
Rien de ce genre pour Port-au-Prince.
Les cameras sont arrivées après.
On ignore de quoi on a eu l’air pendant.
Encore absorbé par la douleur
quand un flash l’aveugle.
C’est pourtant son moment de gloire.
Et cette menace constante :
«Le bilan des morts risque
de s’alourdir.»
Pourquoi