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Libération
Reportage

«Depuis le tsunami, je ne peux plus penser à moi»

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A Kesennuma, village de pêcheurs dévasté, la population est toujours sous le choc.
par Alissa Descotes-Toyosaki, Envoyée spéciale à Kesennuma
publié le 21 mars 2011 à 0h00

Au bord du dock, un homme est assis, pensif. Il regarde un immeuble délabré face à la mer. Cette mer d'huile qui, il y a une semaine, a ravagé la moitié de la ville de Kesennuma, sur la côte nord-est du Japon. «J'ai vu venir le tsunami du deuxième étage de ce bureau», murmure-t-il. Sa voix est calme, il semble se souvenir de cette catastrophe comme d'un mauvais rêve. «C'était vers 2 heures de l'après-midi, le séisme nous a projetés à terre. Je suis allé abriter ma mère et ma femme au deuxième étage. Je savais qu'un tsunami allait venir, mais je n'aurais jamais cru à une telle déferlante.»

L'homme se tait, et observe le soleil qui se couche sur les tas de gravats de la ville, masses fumantes que le vent emporte dans un tourbillon de poussières. De ce port renommé dans tout le Japon pour sa pêche au thon, il ne reste rien. «Quand la première vague est arrivée, je me suis dit que c'était fini. Une vague boueuse qui s'est projetée contre mon immeuble et s'est arrêtée juste quelques centimètres avant la fenêtre.» Ce séisme record a fait trembler tout le Japon. Mais bien plus que les terres, ce sont les côtes japonaises qui ont été devastées à cause du tsunami qui a suivi. La différence est d'ailleurs stupéfiante quand on arrive de l'intérieur des terres.

Nourriture. Tout sur la route semble normal. Puis, soudain, c'est un monde sens dessus dessous : voitures sur les maisons, toits affaissés sur les trottoirs, bateaux arrimés aux carrefour