Ils sont omniprésents, mais invisibles, indispensables, mais marginaux. En un mot, ils font partie du paysage. On peut les voir à chaque entrée de ruelle, au milieu des labyrinthes de venelles qui quadrillent Bangkok, vêtus de leur distinctive jaquette orange. Ce sont les motos-taxis, regroupés en gangs, attendant leurs clients, assis sur leurs machines, prêts à zigzaguer dans l'embouteillage permanent qu'est la circulation dans la capitale thaïlandaise. Tout le monde les utilise, des employés qui se rendent à leur travail aux très riches qui en font leurs messagers. «Ils évoluent dans les fissures de la société, se faufilent entre les classes sociales comme ils se faufilent entre les voitures», explique Claudio Sopranzetti, qui écrit une thèse sur les motos-taxis et la politique en Thaïlande.
Lors des manifestations antigouvernementales d’avril et mai 2010, ces motos-taxis ont constitué le fer de lance des «chemises rouges» qui ont occupé pendant plusieurs mois le quartier commercial de Bangkok. Ils ont servi de gardes du corps, d’agents de renseignements et bien sûr de moyens de transport rapides et efficaces au cœur du danger. La répression des manifestations par l’armée avait fait 91 morts.
Depuis, le gouvernement d'Abhisit Vejjajiva a compris l'importance d'avoir ces «marginaux» de son côté : ils sont près de 200 000 à sillonner en tous sens la capitale et disposent d'un poids politique difficile à ignorer. D'autant plus que des élections se profilent ce