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Chocolater le monde

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Points de vue et cartes du monde avec les Editions Autrement
publié le 23 avril 2011 à 0h00

Les sourires enjôleurs des producteurs ivoiriens sur les tablettes de chocolat équitable rappellent dans le ciel de Pâques, encombré de cloches et d'œufs, qu'une plante, Theobroma, «nourriture des dieux», peut raconter l'Histoire. Tragique lors de la conquête espagnole, et vertueuse depuis que les bons apôtres du commerce éthique tentent de mettre le cacao hors du circuit tracé par les multinationales.

La cabosse est sans doute vue pour la première fois par des Européens, fin juillet 1502, lors du quatrième voyage de Christophe Colomb au large de l'île de Guanaja. Des fèves sont tombées d'un navire et «tous essaient de les ramasser comme s'ils avaient perdu un œil», témoigne Ferdinand, le fils du navigateur. En 1519, le conquistador Cortès remarque qu'elle sert de monnaie d'échange. Le pape Clément VII est bientôt prévenu de l'existence d'un «vin extrait de certaines amandes, bu par les rois». Les Européens s'emparent de la plante, la mettent en boisson à leur goût en la sucrant. Ils lui accordent de guérir tant de maux que tout le monde rêve d'en boire. Inabordable par son prix, le xocoatl des Aztèques devient objet de contrebande hollandaise dans les Caraïbes, provoque des booms cacaoyers dans toute l'Amérique latine. Planté sans succès aux Célèbes et aux Philippines, l'arbre à cabosses s'installe outre Atlantique en 1822, passant du Brésil vers les îles esclavagistes portugaises de São Tomé. Il en vient à prospérer chez l'auteur