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Libération

Tunisie, l’ombre des martyrs

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L’artiste Zoo Project ressuscite les victimes de la révolution tunisienne en installant leurs silhouettes dans les rues de Tunis.
publié le 23 avril 2011 à 0h00

Lorsque la révolution a secoué le monde arabe, Bilal, dit Zoo Project (1), artiste franco-algérien de 20 ans, a senti le besoin de participer. Début mars, sans idée précise, il prend un avion pour Tunis, première étape avant Le Caire et Tripoli. «Peintre de rue» à Belleville, dans le XXe arrondissement de Paris où il est né, cet étudiant des Beaux-Arts «en rupture avec l'institution», ne connaissait personne en Tunisie et n'avait pas un sou en poche.

«Ma première rencontre à Tunis, raconte-t-il, a été la famille et les amis d'un garçon de 19 ans, tué par un sniper. Mohammed Hanchi n'était pas un manifestant, il rentrait d'un entraînement de foot quand il a pris deux balles perdues dans une rue de Tunis. J'ai compris que ce n'était pas la merveilleuse révolution qu'on nous racontait à Paris, et que les martyrs devaient être mon sujet.»

Choqué, le jeune artiste réfléchit pendant une semaine avant de trouver l'inspiration pour rendre hommage à Mohammed Hanchi. Ce sera sa silhouette grandeur nature, première de la série sur les martyrs, qu'il dépose une nuit dans la rue où il est mort. «J'avais peur, je ne savais pas comment cela serait reçu, raconte-t-il, mais j'ai été tout de suite rassuré. Les gens ont besoin qu'on parle des victimes, ils veulent que les responsables soient jugés.»

Sur les 47 morts de Tunis, Zoo Project en déjà dessiné 45 à l'encre noire, avec un gros pinceau. Il n'oublie pas les dizaines d'autres disparus