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Libération
TRIBUNE

Demain, un autre Maroc ?

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par Driss Ksikes, Ecrivain, dramaturge
publié le 28 avril 2011 à 0h00

«J'aime mon pays, mais je l'aimerais encore plus s'il était juste.» Jamais cette phrase d'Albert Camus ne m'a autant interpellé. Le mouvement du 20 février au Maroc, persistant, pacifique et vigilant (les manifestations des 20 mars et 24 avril dans une centaine de localités le confirment), y fait magnifiquement écho. L'esprit du 20 février, revu sous cet angle, nous dit que l'amour du pays n'est pas inconditionnel - l'acceptation de l'autocratie et l'injustice au nom de l'appartenance nationale sont une aberration. Il nous dit que naître, vivre mal ou végéter dans un pays n'est pas une fatalité, mais faire renaître un pays pour mieux y vivre demande tout juste de la volonté. Il nous dit qu'un contrat social équitable et fiable s'impose, et qu'il ne saurait voir le jour avec des constantes inhibitrices qui assurent le statu quo politique : sacralité, soumission, exception. Il nous dit, enfin, qu'un peuple libre et souverain naît de l'exigence d'un meilleur vivre ensemble, du choix de rester dans son pays en acteur qui proteste et pèse dans l'arène, non en spectateur qui consomme et se la boucle.

Ayant choisi, depuis longtemps, de rêver d’un autre Maroc, au lieu de me contenter de celui qu’on veut bien nous servir, au rabais, je m’interroge sur ce qui rend l’esprit du 20 février porteur des germes d’un changement profond. Partons de la marche du 20 mars, suite au discours royal du 9 mars annonçant une réforme de la Constitution. On y observe que de très larges franges