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Libération
Reportage

Japon, l’archipel des déplacés

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Accident nucléaire de Fukushimadossier
Ils ont tout perdu lors du tsunami ou ont abandonné ce qu’ils possédaient dans la zone interdite de Fukushima… Paroles de «réfugiés intérieurs», dans un pays traumatisé.
publié le 29 avril 2011 à 0h00

Sept semaines après, et pourtant… Comme au lendemain du tsunami, le pays, traumatisé, vit toujours un état d’urgence qui ne dit pas son nom. Les jietai (les forces d’autodéfense) semblent dépassées. Le nombre de morts et de disparus paraît encore très sous-estimé et le flot de déplacés affole jusqu’aux humanitaires rompus aux exodes massifs. «Les chiffres disent des choses, mais ne disent pas tout», résume un des 136 000 sinistrés recensé. Les 660 000 foyers sans eau, les 209 000 ménages sans courant ne suffisent pas…

Il manque à cela des visages. Des hommes et des femmes, entre résignation et stoïcisme, condamnés à reprendre vie dans l'un des 2 500 centres d'hébergement. Comme à Minamisanriku, où la promiscuité est la règle. Là, trois femmes, trois générations, dans 4 m2 délimités par des cartons. Et Katsué, 16 ans, qui revit immuablement cette scène : «J'ai sauté du train avant le tsunami. Le conducteur est resté. Même les rails ont été balayés.» A Karakuwa, petit bourg de pêche réduit en ruines, Masafumi Chiba hante les lieux, se sent «autoréfugié», livré à lui-même. Il parvient à aligner des «c'est terrible, c'est terrible, c'est terrible»…

Les lieux peuvent être dépouillés et les survivants dormir à même le sol : la nourriture ne manque plus. «Les dons de chaussures, de tee-shirts» frôlent l'overdose, dit une ONG. Le gouvernement ? Il tarde à faire émerger des «shelters», des abris proviso