Dans la tribu des ombres errantes, il a rang de fantôme. On ne le voit jamais, mais on met sur le compte de son réseau tous les attentats les plus sanglants et les opérations les plus audacieuses qui se déroulent à Kaboul et dans sa région. Chef tribal et religieux à la fois, homme de la Frontière, chez lui dans les montagnes afghanes comme dans les recoins paumés du Waziristan pakistanais, Jalaluddin Haqqani, traqué par les drones et les forces spéciales américaines, campe aussi dans deux autres grands rôles : c’est un allié historique d’Oussama ben Laden, qu’il a toujours protégé depuis les années 80, et c’est un homme, voire un officier, de l’ISI, l’Inter-Services Intelligence, les redoutables services de renseignements de l’armée pakistanaise.
A-t-il été le trait d’union entre le fondateur d’Al-Qaeda et l’état-major pakistanais ? En tout cas, à voir la nature des liens entre certains chefs insurgés afghans et l’ISI, il n’est guère surprenant qu’Oussama ben Laden ait pu s’installer à Abbottabad, avec l’assentiment des services secrets pakistanais, voire avec leur complicité.
Baptisée du nom de son fondateur, le général James Abbott, héros des guerres coloniales britanniques et chevalier de l’ordre du Bain, cette coquette localité, qui garde l’empreinte de ce passé avec son église, son cimetière, son club de gentlemen, est d’abord une ville de garnison, avec une académie militaire réputée. Quand on sait que les extrémistes ont souvent pris pour cible les institutions militai