Sur l’Europe, l’écart se creuse entre «le front» et «l’arrière». Dans les capitales, à «l’arrière», un nationalisme à courte vue se propage : l’euroscepticisme gagne du terrain. Dans toute l’Europe, ce phénomène est nourri par la distance entre la réalité européenne, mondiale, et le débat national. Certains font croire que le partage volontaire de souveraineté dans l’Union européenne constitue le problème : l’Europe cristallise la hargne alors même que la souveraineté pure et parfaite n’existe déjà plus. Le monde est marqué par une forte interdépendance : finances, climat, migrations. Là où le pouvoir est organisé, il n’a plus toujours prise sur les événements. Là où il devrait s’exercer, seule une coopération internationale existe, rudimentaire, qui peine à pallier l’absence de véritable «gouvernance». Si la classe politique nationale déçoit tant, partout, c’est qu’elle ne peut plus tenir les promesses de campagnes électorales autocentrées.
Dans ce contexte, les efforts menés au Parlement européen pour faire naître une nouvelle forme de démocratie mériteraient plus d’attention. Comme en 1914, ceux de «l’arrière» tiennent des discours nationalistes mais se battent peu. Ce qui se passe au «front», au contact des réalités, reste méconnu. Qui s’intéresse à ces députés pratiquant l’art ingrat du compromis ? Qui sait ce qu’ils font ? Pourtant, les gouvernements, par le traité de Lisbonne, ont considérablement accru les pouvoirs de cette assemblée. En matière d’économie et de finan