Une révolution sourd en Europe. Elle n’est pas violente mais pacifique, n’aspire pas à conquérir le pouvoir mais à contester les logiques économiques qui font du marché une puissance devant laquelle les gouvernements doivent plier. A défaut de savoir ce qu’elle veut, elle sait, autrement dit, qu’elle ne veut plus du marché roi, de ce monarque anonyme dont les «craintes» ou la «confiance» décident du sort du monde.
Aussi confuse que profonde, elle s’entend sur tout le continent et, d’abord, sur cette Puerta del Sol, la grande place de Madrid, où quelques centaines de jeunes gens ont planté leur tente il y a dix jours pour crier la colère d’une génération qui compte près d’une moitié de chômeur parmi les moins de 25 ans.
Porté par la sympathie immédiate de familles qui ne peuvent pas admettre que l’avenir de leurs enfants soit à ce point bouché, ce mouvement de protestation a vite grandi, attiré toujours plus de gens et essaimé dans une soixantaine d’autres villes - si bien pris, en un mot, que ces «indignés» comme ils se sont nommés en référence au best-seller de Stéphane Hessel ont créé une nouvelle réalité politique.
Ce que dit le succès de cette nouvelle place Tahrir, c'est qu'une économie qui n'offre plus que des perspectives de régression sociale et condamne un gouvernement socialiste à des mesures d'austérité draconienne pour éviter une «panique» des marchés, «ça ne marche pas». «Le libéralisme, ça ne marche pas», constate ce rassemblement sur le même ton d'évidence tranqu