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Libération

La longue marche des rescapés de Srebrenica

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Dans les archives de «Libé», il y a seize ans. «Libération» est le premier journal à recueillir le témoignage d’un survivant bosniaque de l’enclave. Il raconte les fusillades des prisonniers par les Serbes et comment il en a réchappé en se cachant sous les cadavres.
publié le 11 juin 2011 à 0h00

«C'est là que nous avons été fusillés.» Il dessine le gymnase près de la petite ville de Karakaj, où 300 personnes étaient enfermées, puis la voie de chemin de fer Zvornik-Tuzla toute proche, et la petite route menant par-delà une colline, vers les deux clairières où opéraient les pelotons d'exécution. M.O. parle calmement, comme détaché de lui-même. Ce jeune homme de 24 ans, originaire de Srebrenica, a réussi par miracle à survivre aux exécutions de masse des combattants et civils qui, fuyant l'enclave, sont tombés aux mains des Serbes. Légèrement touché, il est resté enseveli au milieu des cadavres, puis a réussi à rejoindre les lignes bosniaques après six jours de marche dans la montagne en compagnie de deux autres miraculés, H.S., 41 ans, et H. Ce sont les premiers témoins directs qui confirment les massacres nombreux, sinon systématiques, des prisonniers de Srebrenica par les forces serbes. M.O. a décrit les massacres à deux journalistes français, dont l'envoyé spécial de Libération.

M.O. avait quitté Srebrenica le 11 juillet, comme 10 000 combattants et civils qui, plutôt que de se rendre et de se laisser massacrer, préféraient tenter de percer les lignes de front, pour rejoindre les territoires sous contrôle bosniaque, à une soixantaine de kilomètres à vol d'oiseau. Ils avaient peu de vivres, presque pas de munitions et guère plus de 900 armes, dont nombre de vieux fusils de la Seconde Guerre mondiale et des pétoires bricolées. «Nous devions force