Et si Mohamed Bouazizi n’avait jamais été giflé par l’agente municipale Fayda Hamdi, le 17 décembre 2010 en fin de matinée au centre de Sidi Bouzid. Et si Bouazizi ne s’était pas immolé devant le siège du gouverneur après avoir vainement protesté pour qu’on lui rende sa balance confisquée ? Le soir à l’heure de se coucher, dans son exil saoudien, Zine al-Abidine Ben Ali doit se repasser le film à l’envers. Et si… C’est aussi ce que doit se dire Hosni Moubarak, au fond du lit de son hôpital de Charm al-Cheikh. Maudite claque, maudite femme doivent pester Ali Abdallah Saleh, Bachar al-Assad et Muammar al-Kadhafi dans son bunker.
Sans Fayda Hamdi, ils seraient encore là, peinards, à siroter le pouvoir comme un cocktail sous les cocotiers. Au lieu de quoi, c'est le bazar, la révolution, la démocratie, tout ça… Plus encore que Mohamed Bouazizi, ce serait donc elle l'héroïne, qui a mis le feu aux poudres, allumé la mèche d'une révolte trop longtemps contenue qui a enflé, enflé jusqu'à balayer tout un pays puis une partie du globe. On devrait la féliciter, lui dresser une statue. Au lieu de cela, elle a été traînée dans la boue, traitée de tous les noms, à commencer par la propre mère de Mohamed Bouazizi, une paysanne pas commode, qui nous expliquait en janvier : «Ce n'était pas la première fois qu'on saisissait sa marchandise, mais se faire gifler par une femme, en pleine rue, ça l'a brûlé à l'intérieur. Chez nous, les Hamama [sa tribu], ce n'est pas acceptable.»
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Fayda Ham