Six heures du matin, lundi. Un groupe d'hommes cagoulés force la porte d'une maison sur le port de Veracruz (sud-est du Mexique). Ils y tuent Miguel Angel López, sa femme et son fils. C'est le troisième assassinat de journaliste cette l'année, le 69e en dix ans. Depuis 2006, le nombre d'agressions contre la presse est monté en flèche. Tirs de grenade contre les journaux, assassinats, disparitions, menaces… Reporters sans frontières a classé le Mexique parmi les pays les plus dangereux pour la profession, derrière le Pakistan et l'Irak.
Bannis. En cause : la toute-puissance du crime organisé, mais pas seulement. «Les narcos sont souvent responsables des actes les plus violents, détaille Omar Rabago, de Article XIX, une association de défense des journalistes. Mais l'Etat, via l'armée et la police, est responsable de la grande majorité des agressions.» José Rivera, journaliste dans l'Etat de Guerrero (sud), explique que «les menaces apparaissent dès que l'on travaille sur les liens entre narcos et politiques. Et si on touche au blanchiment d'argent, c'est la mort assurée !»
Face à un Etat, au mieux indifférent et défaillant, au pire agresseur, les journalistes n'ont souvent pas d'autre option que l'autocensure. Après des menaces répétées, José Rivera a éloigné sa famille afin de pouvoir continuer à travailler. «Mais quand j'ai vu qu'il n'y avait plus moyen de se protéger, j'ai arrêté de publier sur le narcotrafic.»