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Libération
Récit

Alaouites de Syrie : une revanche sur l’histoire

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Au pouvoir à Damas, cette minorité religieuse longtemps persécutée pourrait tout perdre en cas de chute du régime. D’où la crainte de la constitution d’un «réduit alaouite».
par Fabrice Balanche, maître de conférence à Lyon-II
publié le 1er juillet 2011 à 0h00

Les forces de répression utilisées contre les manifestants en Syrie sont essentiellement composées par des alaouites. C'est pour cette raison que, contrairement à la Tunisie ou l'Egypte, l'armée ne fait pas défection, selon un proverbe alaouite contemporain, «Tu es avec Assad, tu es avec toi-même» («anta maâ Assad, anta maâ nefsak»). Certes, tous les alaouites ne soutiennent pas le régime. Mais au Proche-Orient, ce type de nuance n'a pas court, la guerre civile libanaise, et plus récemment l'Irak, sont là pour en témoigner. Lorsque la violence se déchaîne, la meilleure protection est celle de sa communauté.

La constitution d’un réduit dans la région côtière syrienne, où les alaouites seraient en sécurité en cas de perte du pouvoir à Damas, n’est pas une simple spéculation. Quelques épisodes de la répression actuelle sont significatifs à cet égard. Tel-Kalakh et Jisr al-Choughour, villes sunnites en périphérie du territoire alaouite, sont victimes d’un début d’épuration ethnique. L’armée a laissé les populations fuir vers le Liban et la Turquie, ce qui ne fut pas le cas à Deraa, pourtant frontalière avec la Jordanie. A Lattaquié et à Baniyas, les quartiers sunnites rebelles sont soumis à un véritable état de siège par les militaires, dans le but d’éviter qu’ils ne deviennent des poches de résistance.

Même si le but du clan Assad est de dominer l’Etat national, cela n’est pas incompatible avec la construction d’un territoire alaouite où la communauté serait en sécurité.