Le cas de Bahreïn est une exception dans le grand mouvement de protestation qui s’est emparé du monde arabe depuis le début de l’année : le petit royaume est le seul pays où la contre-révolution l’a emporté sur la contestation. Pour l’instant. En Tunisie et en Egypte, les révolutions sont peut-être inachevées, mais elles semblent au moins irréversibles. Au Yémen, en Libye, en Syrie, les dirigeants résistent avec plus ou moins de férocité - ou d’efficacité - mais leurs jours sont tous comptés et nul ne les imagine rétablir un minimum d’ordre et un semblant de légitimité. A Bahreïn, l’ordre est bel et bien revenu, sinon la légitimité.
«Privilèges». Pourquoi cette reprise en main a-t-elle réussi là où des régimes plus réputés pour leur poigne ne parviennent pas à éteindre la contestation ? D'abord pour des raisons de taille. La population de Bahreïn ne dépasse pas 700 000 habitants. De ce chiffre, il faut retrancher 37% d'étrangers, occidentaux ou venus du sous-continent indien, des Philippines, etc., comme dans la plupart des autres pétromonarchies du Golfe. Deuxième raison, la répression a reçu l'aval d'une part non négligeable de la population, essentiellement la minorité sunnite - qui représente un tiers des nationaux - persuadée à tort ou à raison que la contestation finirait par emporter la dynastie des Khalifa, garante de ses avantages et «privilèges». Au tout début des manifestations, place de la Perle, le clivage communautaire n'est pas encore évident,