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Libération

Des victimes par pertes et oubli

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Après quatre mois de bombardements, aucune estimation des morts et blessés n’a été réalisée. Dans un pays éclaté, le manque d’accès des ONG sur le terrain peut expliquer cet état de fait.
publié le 30 juillet 2011 à 0h00

Ce n'est pas une guerre sans mort, mais c'est une guerre sans bilan. Depuis le 19 mars, une coalition internationale, placée sous le commandement de l'Otan, bombarde sans relâche les forces et les infrastructures du colonel Kadhafi, tandis que les belligérants s'affrontent au sol. Mais aucune organisation n'est en mesure de donner ne serait-ce qu'une estimation du nombre de victimes - morts ou blessés. Ni à l'Organisation mondiale de la santé, ni aux Nations unies, et encore moins au siège de l'Otan à Bruxelles. Pour Nicolas Vercken, de l'ONG Oxfam, il est pour le moins paradoxal qu'une guerre «menée au nom de la protection des populations civiles», en vertu de la résolution 1973 du Conseil de sécurité, ne donne lieu à aucun bilan. «Les Nations unies doivent demander des comptes à l'Otan», dit-il.

Au siège de l'Alliance, un porte-parole justifie ce trou noir par l'absence de troupes au sol, capables d'évaluer les pertes civiles. Plusieurs sources humanitaires pointent aussi la fragmentation du pays en plusieurs fronts, et autant de territoires coupés les uns des autres : aucune instance ne centralise les données concernant les victimes civiles du conflit en Libye. Du côté de Kadhafi, ni les journalistes ni les ONG ne peuvent circuler de manière indépendante. «Si des crimes de guerre sont commis à Tripoli, que Kadhafi laisse les journalistes en rendre compte !» s'écrie Sliman Bouchiguir, le président de la Ligue des droits de l'homme libyenn