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Libération
Reportage

Londres : «Il n’y a rien pour eux, alors ils volent»

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Abasourdis par la violence qui s’est abattue sur leur quartier dans la nuit de lundi à mardi, les habitants de Hackney, dans l’est de Londres, essayent de comprendre.
Un magasin vandalisé à Croydon, sud de Londres, le 9 août 2011. (© AFP Andrew Cowie)
publié le 10 août 2011 à 0h00
(mis à jour le 10 août 2011 à 15h51)

Avec ses maisons en briques d’un étage sommairement peintes, Clarence Road, dans le quartier de Hackney, est une petite rue de Londres où Stephen Frears aurait pu tourner My Beautiful Laundrette. Venu du Sri Lanka en 1996, Sivaharan Kandiah, surnommé Sheva, 39 ans, y tient une épicerie de quartier depuis 2000. Il l’a fermée lundi, à 14 h 30, quand les rumeurs de grabuge sont devenues de plus en plus insistantes : «Les gens nous ont dit « ne restez pas là, il va se passer quelque chose ».» Sheva est rentré chez lui, où il vit avec sa femme et ses deux enfants, âgés de 6 et 2 ans. Planté devant la télé, sur Sky, il voit soudain que son commerce, le Clarence Road Convenience Shop, est la proie des pillards. «Ça m’a rendu fou !» Il fonce jusqu’à la rue. Mais la police ne le laisse pas passer. Il n’y a rien à faire.

La nuit d'enfer a passé. Hier midi, il est assis dans sa camionnette, face à l'épicerie. Il a tout perdu. Impression d'injustice : «A eux, les pillards, il n'est rien arrivé. Mais à moi ! Toute ma vie est foutue !» Onze ans à bosser sept jours sur sept. «Jamais de vacances ! C'est ça la récompense ?» Le magasin est dévasté. «En une heure ou deux, tout est parti.» Il reste une boîte de crème glacée dans le congélo. Et l'écriteau «Chers clients, ne lisez pas les magazines SVP». Une dame ramasse par terre un paquet de thé. Elle veut le payer : «Mais si, prenez l'argent !» Sheva tourne la tête. «Je n'ai pas d'assur