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Interview

«Une caméra n’empêchera jamais de piller ou de casser des vitrines»

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Le criminologue canadien Stéphane Leman-Langlois voit dans les émeutes l’échec de la police britannique, qui a abandonné le contact avec la population.
publié le 12 août 2011 à 0h00

Titulaire de la chaire de recherche du Canada en «surveillance et construction sociale du risque» à l’université de Montréal, criminologue spécialiste du «rôle de la police dans la société», Stéphane Leman-Langlois livre sa lecture des émeutes anglaises.

Pourquoi la police a-elle été dépassée par les événements ?

Déjà à cause de l'effet de surprise. Et le manque d'hommes, tout simplement. En France, quand les gens descendent dans les rues, vous envoyez les CRS, qui encadrent les débordements et, si besoin, chargent dans le tas. En Angleterre, c'est différent. La police est née à la suite des bavures de l'armée et a été pensée en opposition totale avec les méthodes militaires : ce sont des experts du crime. De plus, depuis une dizaine d'années, les Anglais ont adopté les techniques de l'intelligence-led policing, très axées sur l'analyse des renseignements statistiques et plus du tout au contact du public. Pour schématiser, on a de plus en plus affaire à des policiers au-dessus des citoyens, qui manient des données pour trier le bon grain de l'ivraie. Et ces mêmes experts se retrouvent démunis devant la foule d'émeutiers.

Les gouvernements anglais successifs ont privilégié la vidéosurveillance, installant plus de 4 millions de caméras sur le territoire. Cela fonctionne-t-il ?

Depuis les années 80 en effet, ils dépensent beaucoup d’argent pour mettre une caméra à chaque coin de rue. A l’époque, c’était présenté comme la solution pour une société sans crime, mais il faut avouer que les résultats sont plus que mitigés. En ce moment, les policiers de Scotland Yard scrutent leurs écrans, un œil sur les caméras et un autre sur Twitter, pour tenter d’intercept