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TRIBUNE

Cher Antonin, la grâce de Tahrir est loin…

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Lettres du printemps arabe 2/5
par Aalam Wassef, éditeur et auteur du blog «Cris d’Egypte»
publié le 16 août 2011 à 0h00

J’avais promis de t’écrire. Je n’ai pas eu l’occasion de me remettre à la musique ou de faire quoi que ce soit avec les fichiers que tu m’as envoyés. Mes journées cairotes sont pour le moins répétitives. Travail. Mauvaises nouvelles. Travail. Nouvelles désastreuses. La grâce des 18 jours passés à Tahrir du 25 janvier au 11 février est loin derrière. J’ai la nostalgie d’Internet coupé, du trafic arrêté, des boutiques closes. Là, nous étions en alerte, intelligents et forts.

Parce qu'il a tant d'expérience et nous si peu, le Conseil supérieur des forces armées (CSFA) a entrepris, dès le 11 février, de s'approprier la révolution, celle-là même qui aurait dû s'assurer de sa mise à l'écart et de la libération immédiate des médias. En 2006 déjà, je te disais à quel point le régime militaire égyptien était habile dans la maîtrise de son image et dans l'art du storytelling, à l'intérieur comme à l'extérieur du pays. La mise en scène de la chute de Moubarak était en tout point admirable. On y a tous cru. Nous sommes les protecteurs de la révolution, nous saluons les martyrs tombés pour la liberté et les idéaux légitimes de la révolution. Le peuple égyptien verse une larme. S'ensuivent des semaines de fête, de liesse populaire au nationalisme déjà inquiétant et un début de xénophobie qui ne cessera de s'aggraver. Une machination médiatique tourne à plein régime. Propagande et campagnes marketing de première bourre, effets d'annonces qui rassurent la population jusqu'à