Un enfant d’à peine 5 ans gambade près du muret séparant la route en terre des abris de fortune. Il brandit avec fierté son pistolet en plastique jaune fluo. Au même moment, une rafale retentit. Un milicien, mitrailleuse en main et munitions en bandoulière, esquisse un sourire, puis lui fait brutalement signe de dégager. Dans le camp de Badbaado, situé dans le quartier de Darkenley (sud de Mogadiscio), plus de 20 000 déplacés somaliens ayant fui la famine s’entassent dans l’attente d’une aide humanitaire qui arrive au compte-gouttes.
Badbaado, en somalie, signifie «protéger», mais c'est le contraire qui se déroule actuellement. «Il n'y a guère de différence entre ici et le village que nous avons quitté, constate Sehin Ali, mère de sept enfants. Là-bas, les shebab nous avaient pris tout notre bétail, ici, on ne reçoit de la nourriture que très irrégulièrement.» Elle s'interrompt aussitôt lorsque deux hommes, dans le groupe qui s'est formé pour l'écouter, profèrent des menaces à voix basse. Evoquer les shebab, les insurgés islamistes qui ont annoncé leur retrait de la capitale il y a quinze jours, est risqué. Beaucoup de leurs partisans sont encore présents dans la ville et pullulent dans les camps de déplacés.
Insurgés. Ici, la survie se négocie au quotidien. Il y a quelques jours, une distribution de nourriture a tourné au pillage généralisé et la fusillade qui a suivi a fait 10 morts. Des centaines de personnes terrorisées se sont empressées