Menu
Libération
Reportage

En Libye, dans l’effroi d’un charnier

Article réservé aux abonnés
Le monde arabe en ébullitiondossier
Les insurgés se sont emparés, samedi à Tripoli, d’une caserne où des soldats pro-Kadhafi avaient massacré une cinquantaine de personnes.
publié le 29 août 2011 à 0h00

Le 32e régiment motorisé, dit brigade Khamis, du nom d'un des fils Kadhafi, est cantonné dans le quartier de Kalwar al-Jorjan, au sud-est de la capitale. Le terrain militaire, bordé de hauts murs de béton, s'étend sur une dizaine d'hectares environ. Il est tombé définitivement samedi à l'aube après avoir été plusieurs fois pilonné par l'Otan, et pris d'assaut par des centaines de rebelles qui ont découpé tous les bâtiments à la mitrailleuse lourde. A terre, des écouvillons pour canon que l'un des rebelles, hilare, utilise comme porte-cigarettes. Tout au fond, derrière le mur d'enceinte de la caserne, une cour sablonneuse et ce qui devait être un atelier de mécanique générale en briques avec ses deux portes métalliques trouées par des rafales d'automatiques. Sur le battant gauche, inscrit à la bombe aérosol : «Le diable s'appelle Kadhafi.» La couverture en tôle ondulée du garage s'est redressée sous l'effet de la chaleur. Les poutrelles rivetées sont tordues, un palan pour moteur est noir de suie. Et, sur le sol, une cinquantaine de corps calcinés.

C'est le docteur Salem Rajab, qui dit tenir un cabinet médical dans le quartier, qui a procédé samedi midi au décompte macabre. Sous un auvent de tôle mitoyen au garage, sur un sol en béton, des couvertures ont été jetées sur trois cadavres en pantalon de treillis. Les corps sont gonflés par la décomposition. L'un des cadavres, la tête ouverte par un tir à bout portant, a les pieds pris dans le nœud coulant d'une corde en