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grand angle

Canada La ville qui aime l’amiante

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Asbestos a vécu jusque dans les années 80 de sa mine à ciel ouvert, aujourd’hui tarie. L’extraction de «l’or blanc» devrait reprendre, en souterrain. Avec le soutien de la population locale.
publié le 5 septembre 2011 à 0h00

Le trou bée, au milieu de la ville. Au fil du temps, le cratère de la mine Jeffrey, toujours plus large, toujours plus vorace, a englouti des maisons, des rues, des commerces, des églises. Mais les 7 000 habitants d'Asbestos, au sud de la province du Québec, ne lui en tiennent pas rigueur. Au contraire. Depuis cent trente ans, l'extraction de l'amiante chrysotile - l'amiante blanc - a donné à cette bourgade sa raison d'être, son orgueil, et son nom : asbestos signifie amiante en anglais. Indestructible en grec, comme ce métal fibreux, si résistant au feu. Et comme la foi dont il est l'objet dans cette petite ville canadienne.

A pleins poumons dans les moulins de la mine

On est loin, ici, des accusations qui résonnent depuis deux ans à Turin, théâtre du plus grand procès intenté par les familles de milliers de victimes de l'amiante, et où le parquet a requis, en juillet, vingt ans de prison contre deux responsables du groupe Eternit, autrefois grand producteur du minéral. Fidèle Marcoux, lui, a passé sa vie dans ce minerai qu'on appelait il y a quelques décennies, avant qu'on ne découvre son caractère cancérigène, l'«or blanc» tant il s'en vendait. Enfant, il jouait avec la poussière d'amiante qui recouvrait alors les pelouses, chemins et toits d'Asbestos. Adulte, il l'a respiré à pleins poumons dans les moulins de la mine où il a travaillé un quart de siècle. Depuis quinze ans, il souffre d'asbestose, une maladie pulmonaire typique des trava