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Libération
Reportage

Tripoli donne la chasse aux Noirs

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Pris de frénésie, les insurgés voient derrière chaque immigré d’Afrique noire un mercenaire à la solde de Kadhafi. Fuyant pillages et agressions, Maliens, Nigérians et Tchadiens se réfugient dans le port de Sayad.
publié le 5 septembre 2011 à 0h00

Richie, un Nigérian de 29 ans, s’est installé sous la coque renversée d’un vieux bateau en bois. Il dort sur un matelas sale, aux côtés d’une dizaine de ses compatriotes. Paul Adou, un Malien de 45 ans, a préféré le pont d’un chalutier. Pour sa femme, enceinte de huit mois, il a créé un abri avec des couvertures déchirées.

Comme ces deux hommes, entre 800 et 1 000 Africains se sont réfugiés ces dernières semaines dans le port de Sayad, à 25 km à l'ouest de Tripoli, pour fuir les pillages et les ratissages qui ont accompagné la chute du régime Kadhafi. Ils se disent menacés, pris au piège d'un conflit auquel ils n'ont pas participé. «Je travaillais ici depuis sept ans. Mais aujourd'hui, je suis comme en prison. Je ne peux pas quitter le port, je risque de me faire tuer. Je n'en peux plus de vivre ici, il faut que quelqu'un nous aide», s'énerve Festus, un Nigérian arrivé il y a une semaine dans le camp. Les réfugiés du port de Sayad sont tous des travailleurs immigrés. «Il y avait quelques mercenaires de l'armée de Kadhafi avec nous, mais ils se sont enfuis en bateau le 21 août, dix minutes avant que les rebelles arrivent ici», explique Richie.

Désert. Présents depuis plusieurs années en Libye, ils avaient souvent des petits boulots, dans le bâtiment ou la restauration. Paul est carreleur. Quand il a émigré du Mali, il y a cinq ans, il a tenté de s'installer à Sabha, une ville du sud de la Libye, aujourd'hui encore contrôlée par les forces kadh