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Libération

Anna Politkovskaïa, la vérité assassinée

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Dans les archives de «Libé», il y a cinq ans. Connue pour ses reportages sur la Tchétchénie, la journaliste russe a été tuée par balles. Elle ne cessait de dénoncer les exactions de Poutine et s’apprêtait à publier des articles sur la torture.
publié le 8 octobre 2011 à 0h00

«Pourquoi je déteste Poutine ? Pour sa balourdise, son cynisme, sa xénophobie, ses mensonges, pour les gaz qu'il a utilisés lors du siège de Nord-Ost [la prise d'otages du théâtre de la Doubrovka à Moscou en octobre 2002, ndlr], pour le massacre des innocents [les Tchétchènes tués dans les bombardements russes]» (1). Anna Politkovskaïa était ainsi : radicale, lucide, sans détours et sacrément courageuse. Car il fallait du cran pour continuer à se rendre en Tchétchénie, enquêter sur la corruption, s'insurger contre les fraudes électorales et l'étouffement de l'opposition russe, dénoncer l'ultranationalisme et le racisme encouragés par le régime de Vladimir Poutine… Sans doute se croyait-elle aussi protégée par sa notoriété internationale.

Anna Politkovskaïa, une allure décidée, un visage fin, n'était pas prédestinée à devenir une journaliste engagée. Elle était née aux Etats-Unis de parents diplomates soviétiques. Lorsque la pérestroïka débute dans les années 80, elle est journaliste et suit de près les violations de la toute nouvelle liberté de la presse. Elle ne couvre pas la première guerre de Tchétchénie (1994-1996). A l'époque, les médias sont majoritairement contre. Acculé, le président Boris Eltsine finit par signer un accord de paix. Le déclic fut la deuxième guerre de Tchétchénie, lancée en septembre 1999 par Vladimir Poutine. Séduits par cet homme à poigne qui promet «d'aller buter les terroristes jusque dans les chiottes», les médias ne critiquent