C’est une route droite au milieu d’une plaine morne avec des dizaines d’usines de toutes tailles alignées côte à côte. Ksar Hellal est la capitale du textile tunisien, symbole d’un «miracle économique» aujourd’hui secoué par la transition démocratique. Jacques Bruynooghe y a fait fortune. En 1976, ce Belge est l’un des premiers investisseurs étrangers à s’installer à Ksar Hellal, quatre ans après l’adoption de la loi sur les entreprises exportatrices. La «loi 72» et ses faveurs fiscales ont fait de cette ville de 40 000 âmes, spécialisée dans l’artisanat textile, la capitale de la confection offshore, mention jean.
Aujourd'hui, Ksar Hellal compte 150 entreprises textiles, des «lois 72» en majorité. Tunisiennes, françaises, allemandes ou italiennes, petites ou grandes, elles envoient toute leur production en Europe. Les villes alentour ont suivi le mouvement. La société Jacques Bruynooghe Global (JBG) a bénéficié de ce système. «On est devenu la plus grosse entreprise de la ville. Il y a vingt ans, on avait 500 salariés. Aujourd'hui, ils sont 2 000», expose l'investisseur dans son bureau, où des photos jaunies de boxeurs et de rallyes auto le disputent au canapé cabriolet. JBG confectionnait pour Levi's ; aujourd'hui, les principaux clients se nomment H&M, Zara ou Pimkie. Petits prix, toutes petites marges. La boîte ne fait plus de bénéfices depuis des années. La révolution n'a rien arrangé. Les patrons sont inquiets sur l'avenir alors que les salariés râlent de la tr