Menu
Libération
TRIBUNE

Egypte : retour en prison

Article réservé aux abonnés
par Alaa Abdel Fattah, Blogueur égyptien détenu depuis dimanche à Bab el Khalk au Caire.
publié le 4 novembre 2011 à 0h00

«Jamais je n’aurais cru revivre mon expérience d’il y a cinq ans. Après la révolution qui eut raison du tyran… Retourner à ses geôles ? Tous mes souvenirs de détenu me reviennent ; se coucher sur le sol, vivre à 9 dans une cellule de 2 mètres sur 4, écouter les chansons et les conversations de zonzon. Je ne me souviens plus de ce que je faisais pour garder, durant mon sommeil, mes lunettes à l’abri. Elles ont été piétinées trois fois depuis ce matin. Les mêmes lunettes qui m’ont accompagné lors de ma première incarcération en 2006, quand je fus arrêté pour avoir appelé à un système judiciaire indépendant.

Me voilà à nouveau enfermé sur la base d’accusations sans fondement ; la seule différence, cette fois-ci, c’est que nous n’avons plus affaire au procureur de la sécurité d’Etat, mais au procureur militaire - un changement en harmonie avec la période militaire que nous traversons. La fois précédente, je partageais mon incarcération avec cinquante camarades du mouvement Kefaya (Assez). Cette fois je suis seul. M’accompagnent dans l’épreuve huit détenus. On opprime, ici, le coupable comme l’innocent. Quand ils apprirent que j’étais un "jeune de la révolution" ils se mirent à damner cette révolution qui n’a pas été fichue de mettre l’Intérieur "au pas".

J’ai passé les deux premiers jours à écouter leurs histoires de torture aux mains de notre police résolue à prendre sa revanche sur les corps des plus démunis et des laissés pour compte, coupables ou innocents. De leurs histoires,