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Libération
EDITORIAL

Enragés

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Le monde arabe en ébullitiondossier
publié le 28 novembre 2011 à 0h00

Une inquiétude, une colère même parfois. Il faut entendre la voix des multiples personnalités du monde arabe venues débattre ce week-end à Lyon, lors du Forum de Libération. Toutes se sont inquiétées du poison de la peur, de la méfiance ou de la menace qui paralyse l'opinion française et ses représentants devant les aléas et les incertitudes des révolutions arabes. Comme si, au fond, et en dépit des belles proclamations, les Français étaient plus à l'aise avec la fausse stabilité des dictatures qu'avec les prises de risque de l'émancipation. Comme si, au moment où les peuples participent pour la première fois de leur histoire à des élections démocratiques - à partir d'aujourd'hui en Egypte -, nous ne les pensions capables que de s'engouffrer dans la nuit islamiste. Blogueurs militants, juristes ou intellectuels égyptiens et tunisiens, tous ont protesté contre les mises en garde d'Alain Juppé fixant aux nouveaux régimes «des lignes rouges» à ne pas franchir pour bénéficier de l'aide de la France, alors que jamais le Quai d'Orsay n'avait eu pareille exigence avec les dictateurs. Ils sont venus nous dire que, comme les «enragés» de la place Tahrir, les sociétés civiles ne se laisseront pas voler leur révolution, qu'ils ne sont nullement disposés à se passer d'une liberté d'expression arrachée de haute lutte. A les entendre, on avait soudain l'étrange impression que les révolutionnaires arabes faisaient davantage confiance aux vertus de la démocratie que les pe