Sun Mu est un provocateur qui se cache. Dans la salle de réunion de la chambre de commerce de l’Union européenne en Corée du Sud, le peintre d’origine nord-coréenne a exposé côte à côte deux de ses tableaux, deux portraits. A gauche, Park Chung-hee, le général qui a verrouillé la Corée du Sud entre 1961 et 1979 ; à droite, Kim Jong-il, le dictateur du Nord. La juxtaposition relève sinon du blasphème, du moins de l’ineptie pour nombre de citoyens sud-coréens.
Casquette de cuir et sourire en coin, Sun Mu a fui son pays en 1999. Il est tout sauf un idiot voulant suggérer l'amalgame entre les deux Corées, aujourd'hui à des années-lumière l'une de l'autre. Simplement, depuis qu'il est arrivé dans la capitale sud-coréenne, en 2001, au terme d'un périple fou de deux ans à travers l'Asie du Sud-Est, cet artiste de 40 ans n'a eu de cesse de questionner les ressemblances et différences entre les deux pays en s'emparant de la propagande qu'il parodie. Et cela sans jamais faire du Nord le grand diable incarné : «La Corée du Sud aussi a eu un dictateur.»
Dans une péninsule figée dans la guerre froide et dans une représentation en noir et blanc de l'histoire, l'artiste a choisi de regarder des deux côtés de la ligne de démarcation du 38e parallèle, «au moins pour faire comprendre ce qui se passe au Nord en dehors des concepts politiques. Les gens ne savent pas bien ce qui s'y déroule». Son pseudonyme est tout un programme : Sun Mu signifie «sans frontière».
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