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Libération
Reportage

Port-Saïd, ville restée à quai de la révolution

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A l’entrée du canal de Suez, la cité, économiquement exsangue, est politiquement inerte.
publié le 2 janvier 2012 à 0h00

Sur la Méditerranée laquée, deux porte-conteneurs et trois navires gaziers, cheminées fumantes, mouillent en attente de faire route vers Suez. Comme chaque jeudi, le professeur de sciences politiques Gamal Zahran se déplace depuis Le Caire, à l'aube, vers Port-Saïd. Il emprunte ensuite pour dix minutes de traversée l'un des bacs et passe d'une rive à l'autre de l'embouchure du canal pour délivrer son cours hebdomadaire sur le campus qui se trouve, lui, sur la rive asiatique, à Port- Fouad. «La révolution, nous ne l'avons pas vue, reconnaît-il. Le procès Moubarak [qui doit reprendre début janvier, ndlr] ne passionnera pas mes étudiants. Ils sont presque en dépression, passifs et sans idéaux. Ici s'est pourtant développé le nassérisme avec la nationalisation du canal, mais il n'en reste pas grand-chose. Aux législatives, les partis nassériens plafonnent à 10% alors que les religieux sont à 40, les libéraux à 20 et la gauche à 30.»

«Abattus».Le professeur Zahran, 55 ans, a été député en 2005 dans une circonscription du Grand Caire sous l'étiquette «indépendant». «Port-Saïd est totalement endormi, poursuit-il. Pourtant, il s'agit d'une ville éduquée. Je passe sur sa grande tradition commerçante due à sa façade maritime. Seuls les plus anciens, à qui on a raconté les occupations anglaise et française, vivent dans le souvenir d'un passé cosmopolite.» Mais ce qui chagrine le plus le professeur, ce sont ses élèves