La récente présentation des conclusions de l'expertise commandée par les juges Marc Trévidic et Nathalie Poux sur l'attentat du 6 avril 1994 contre le président Habyarimana (Libération du 11 janvier) ne désigne pas encore formellement les auteurs de cet assassinat. Si bien des incertitudes demeurent, elle prive cependant les révisionnistes de l'histoire du génocide de leur principal argument. Les enjeux ne sont pas minces en France, tant l'inflation des discours récusant la spécificité du génocide des Tutsis a placé l'histoire de cet événement majeur du XXe siècle dans le champ des polémiques, de l'invective et des procès d'intention.
S’appuyant sur des constructions idéologiques du passé, beaucoup d’auteurs revendiquant le statut «d’experts» ou de «journalistes d’investigation» fondèrent leurs prétentions historiques sur le postulat, qui s’avère aujourd’hui faux, selon lequel le Front patriotique rwandais (FPR) était «nécessairement» à l’origine de l’attentat afin de déstabiliser le pays et ainsi prendre le pouvoir par les armes. Dans ces récits, nourris de «révélations» et de «scoops» médiatiques, le massacre des Tutsis s’est alors trouvé ravalé au rang de réaction de «fureur» d’une population hutue ivre de vengeance. Une autre version, relevant d’un négationnisme plus radical encore, a également imputé à Paul Kagamé la responsabilité