Professeur émérite à l'Université d'Athènes, Constantin Tsoukalas, qui a étudié puis travaillé en France où il était réfugié pendant la dictature des colonels, est considéré aujourd'hui comme l'un des plus importants sociologues grecs. Dernier ouvrage paru : l'Invention de l'altérité (éd. Kastaniotis, non traduit).
Le seuil de ce que peuvent supporter les Grecs a-t-il été atteint ?
Ce n’est pas un seuil objectif : il évolue en fonction des perspectives réelles ou imaginaires d’une population qui a vu son niveau de vie dégringoler de plus de 50% en deux ans et qui risque de se voir imposer de nouvelles mesures dans quelques mois. C’est précisément le manque de perspective d’une sortie de crise qui rend le sauvetage d’une société grecque en déshérence totalement invraisemblable. Si le gouvernement actuel a réussi dans le court terme à éviter l’explosion sociale, il est aujourd’hui touché à son tour par le manque de crédibilité qui caractérise l’ensemble du monde politique. Je crains que les réactions de la population soient de plus en plus violentes, illégales et incontrôlables. Il ne faut pas oublier que, dans une situation certes différente, mais comparable, les crises des années 20 et 30 ont conduit aux phénomènes fasciste et nazi. Nous n’en sommes pas là, et il est très improbable que l’histoire se répète de la même manière. Néanmoins, on n’est pas obligé de croire que les crises déboucheront sur des solutions plus humaines, plus égalitaires et plus démocratiques. La peur de l’anarchie pourrait conduire à la naissance de régimes pl