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Interview

«Tout le monde se regarde en chiens de faïence»

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Le politologue Tewfik Aclimandos décrypte la situation politique un an après la révolution et à quatre mois de la présidentielle :
publié le 13 février 2012 à 0h00

Politologue et chercheur au Collège de France, Tewfik Aclimandos revient sur le bilan de la révolution égyptienne un an après la chute de l’ancien dictateur Hosni Moubarak, qui a laissé le pouvoir au Conseil supérieur des forces armées (CFSA), présidé par le général Tantaoui. Les premières élections libres ont donné une large victoire aux islamistes, les Frères musulmans, mais aussi les salafistes nettement plus radicaux. Toujours plus contestés par la population, ils ont promis de laisser le pouvoir aux civils après l’élection présidentielle prévue avant la fin du mois de juin.

Un an après, peut-on parler de chaos en Egypte ?

On reste dans une situation révolutionnaire et donc par nature instable et imprévisible. Tout le monde se regarde en chiens de faïence et se rend coup pour coup. Il y a une crise de confiance dans les institutions. La police a montré son incapacité à assurer seule la sécurité du pays et a aujourd'hui peur de sa population. L'armée est très critiquée pour sa gestion de la période de transition et des accords supposés qu'elle est en train de passer avec les Frères musulmans. Personne ne croit en l'indépendance de la justice. Je pense qu'il y a beaucoup de lignes de fracture dans la société, entre ouvriers et patrons, coptes et musulmans… La situation peut s'embraser à tout moment, comme on vient de le voir après ce qui s'est passé à Port-Saïd [74 morts dans des affrontements entre supporteurs après un match de football, le 1er février, ndlr]. Et le très mauvais contexte économique et