Le Bahreïn reste un «angle mort» des révolutions arabes. Pourtant, un an après l’occupation de la place de la Perle à Manama, rien n’est réglé. Au contraire, entre manifestations quotidiennes réprimées et grève de la faim de détenus politiques, l’archipel semble glisser de la mobilisation pacifique vers des formes d’intifada. Sur 1,3 million habitants, 65% des 550 000 nationaux sont chiites. Les discriminations dont ils sont l’objet sont la toile de fond des tensions : cantonnée dans des villages et des quartiers dégradés, la communauté chiite n’a qu’un très faible accès à la fonction publique et aux politiques sociales et est interdite d’accès à la police et à l’armée. Le taux de chômage y est très élevé. Par contraste, la famille régnante sunnite des Al-Khalifa accapare les ressources économiques et le pouvoir politique. La Constitution de 2001 n’a amorcé aucune démocratisation. Le découpage des circonscriptions garantit aux sunnites une majorité automatique à la Chambre basse élue, et la Chambre haute est nommée. Frères musulmans et salafistes proches des wahhabites saoudiens y sont hégémoniques. Le pouvoir naturalise massivement des étrangers sunnites, pour augmenter le poids statistique et politique des sunnites.
Les revendications démocratiques du printemps 2011 entendaient impliquer l'ensemble de la population : une monarchie constitutionnelle, un redécoupage électoral, la désignation du Premier ministre au sein de la majorité électorale. Au-delà des chiites, la dynami