Soudain, les tirs de gaz lacrymogènes ont semé la panique devant le bureau de vote d'un quartier résidentiel du centre de Dakar. «Nous ne tolérons aucune manifestation politique le jour des élections présidentielles. C'est la loi qui l'exige», a commenté sobrement le commissaire de police, peu de temps après l'assaut de ses hommes contre les supporteurs du président sortant, Abdoulaye Wade. De façon un peu musclée, la police sénégalaise a démontré, hier matin, qu'elle n'était pas au service d'un homme mais d'un Etat. Et même les manifestations de soutien à Wade, qui vote depuis toujours dans cette école franco-arabe, ne pouvaient venir troubler des élections censées confirmer aux yeux du monde que le Sénégal est une réelle démocratie. Bien plus que le choix entre deux hommes - Abdoulaye Wade, au pouvoir depuis douze ans, ou son ex-dauphin Macky Sall -, c'est bien l'enracinement de la démocratie qui était mis à l'épreuve hier.
«Un exemple». Arrivé au bureau de vote juste après l'assaut de la police, le dirigeant de la mission des observateurs de l'Union européenne, Thijs Berman, l'a confirmé à sa façon : «Avec le coup d'Etat inadmissible qui s'est déroulé au Mali voisin, la responsabilité qui pèse sur le Sénégal est énorme. Ce pays doit rester un exemple pour toute la région.» Des paroles d'espoir qui ont précédé de peu l'arrivée de Wade : vêtu d'une gandoura blanche, le «Vieux» semblait englouti par la foule alors qu'il tentait de se frayer