Début de soirée orageuse sur la triste banlieue viennoise. Les militants et sympathisants du Parti autrichien de la liberté (FPÖ) ont quitté les nombreuses HLM du quartier de la Donaustadt, dans le XXIIe arrondissement, où ils résident, et se rendent à une réunion de section, organisée dans un hôtel modeste. Entre les échangeurs d'autoroute et les hypermarchés discount, l'extrême droite autrichienne réalise ici ses plus beaux scores, supérieurs à 30% des voix. Elle joue des coudes avec la gauche, qui conserve les clés de l'hôtel de ville depuis des décennies et dont les élus sont comparés à des oligarques repus. Ce soir-là, la bière pression et le Weiss Gespritzt, ce petit vin blanc sec coupé à l'eau gazeuse, sont offerts. Entre deux cigarettes, la petite assemblée d'une centaine de personnes, majoritairement masculine, croque des saucisses de Francfort, badigeonnées de moutarde et de copeaux de raifort frais.
Dans un coin, un petit monsieur cravaté, lunettes rondes d'intellectuel et crâne rasé, propose à la vente des ouvrages antiavortement et sur la Seconde Guerre mondiale. L'ambiance est chaleureuse. Günther Rozumilowski, conseiller municipal, discute de l'arrivée de familles turques dans les logements libérés par le décès d'«Autrichiens de souche». Il compare la situation de la banlieue de la capitale autrichienne à celle de Paris qu'il imagine perpétuellement en flammes. «Si la gauche reste au pouvoir à Vienne, dit-il, notre quartier verr