Une ambassadrice, deux religieuses et une ancienne détenue s’entassent avec une cinquantaine de personnes dans la salle commune de la prison de Baabda, à l’est de Beyrouth. D’habitude, c’est ici que les 70 détenues se «promènent», font la cuisine, leur lessive. C’est aussi ici qu’ont eu lieu, à partir de juillet, les ateliers de dramathérapie animés par l’actrice Zeina Daccache. Des spots lumineux et une étroite estrade ont transformé la pièce en théâtre. Treize Shéhérazade font leur entrée.
Des Shéhérazade accusées de consommation ou de trafic de drogue, de vol, du meurtre de leur mari. «Voici la robe de ma fille, commence l'une des actrices. Lorsque j'ai été arrêtée, elle portait cette robe. J'aurais dû manger de la terre plutôt que de me droguer.» «Aujourd'hui, j'ai eu mon premier bébé. Peut-être que maintenant il va arrêter de me frapper et de m'insulter», se souvient une autre. Leurs contes des mille et une nuits parlent de pauvreté, de machisme, de mariages malheureux. En 19 tableaux, souvent drôles, ces femmes racontent également l'absence de lois contre les violences conjugales, les jugements qu'elles attendent des mois, voire des années. Et leurs conditions de détention, le houmous à tous les repas, les parloirs bondés. «C'est la surpopulation qui m'a le plus frappée», assure Zeina Daccache.
Dans les cellules, où elles peuvent être jusqu'à 24, c'est le chaos. Dans la salle commune, c'est le chaos. La nuit, il y a celles qui regarden