Le général Sau Phan, chef de la lutte contre le trafic de faux médicaments au Cambodge, attend, décontracté, le diagnostic du Truscan. Cette merveille technologique permet de déceler, en moins d'une minute, si un médicament est authentique ou non. Le galonné a glissé dans l'appareil qui fonctionne par spectrographie un comprimé de Lipitor, un médicament permettant de diminuer son taux de cholestérol. Le diagnostic clignote sur l'écran : «faux». Dépité, Sau Phan lève les bras au ciel : «Je ne peux pas le croire !» Et pourtant, même le numéro 1 de la lutte contre le trafic de médicaments dans ce pays peut se retrouver piégé par les contrefacteurs.
«Du sable, de la poussière et de la peinture murale»
L'anecdote est révélatrice de l'ampleur qu'a prise ce commerce illégal au Cambodge, et plus généralement en Asie, depuis une quinzaine d'années. Les chiffres sont impressionnants : 30% des médicaments vendus en Asie du Sud-Est seraient contrefaits, selon l'Institut international de recherche contre la contrefaçon de médicaments (Iracm), installé à Paris. Mais les statistiques sous-estiment probablement l'étendue du mal. «Quand il y a un raid sur une pharmacie pour saisir un faux, tous les autres praticiens retirent le produit de leurs rayons. Les quantités sont énormes. J'ai moi-même assisté à des destructions de plusieurs millions de comprimés», explique un enquêteur qui travaille au Cambodge depuis quatre ans.
Le retour sur investissement pour les trafiquants est considérable : dix fois plus que pour la fau