C'était il y a dix jours, à Tunis. Surpris par le ton d'évidence sur lequel elle venait d'évoquer «les prochaines élections», j'ai interrompu cette avocate, pilier de la mouvance démocrate. «Car vous êtes donc sûre qu'il y a aura de prochaines élections ?» lui ai-je demandé en lui rappelant qu'au lendemain des législatives de l'automne dernier, la plupart de ses amis considéraient que la Tunisie venait de vivre ses premières et dernières élections libres.
La majorité des laïcs tunisiens étaient, à l’époque, convaincus que les islamistes d’Ennahda ne rendraient jamais le pouvoir et que leur pays venait d’entrer, comme l’Iran de 1979, dans de longues décennies de théocratie.
Elle a souri : «Nous étions si déprimés que je n'étais moi-même pas sortie de ma chambre pendant trois jours et que je faisais semblant de dormir pour ne pas devoir répondre aux questions des enfants et de mon mari…» Elle en sourit aujourd'hui car l'atmosphère a totalement changé à Tunis.
Ce n’est pas, et loin de là, que tout aille bien. Piétistes ou jihadistes, simples intégristes ou partisans de l’imposition par la violence de leur conception de l’islam, les salafistes étoffent leurs rangs. Quand ils ne s’attaquent pas aux débits de boissons alcoolisées, c’est à la presse, devenue le plus actif défenseur de la laïcité. Ils inquiètent d’autant plus que, tout en les condamnant en mots, le gouvernement islamiste les ménage dans les faits.
Le pouvoir et les salafistes en apparaissent c