Alors qu’elle suscitait plus d’inquiétudes que ses pays voisins, la Tunisie et l’Egypte, en raison de sa supposée perméabilité aux islamistes, et surtout des tiraillements centrifuges menaçant le pays, la Libye vient de réussir des élections dont les résultats disqualifient les pronostics alarmistes.
Pourtant, la tenue même de ces élections semblait tenir de la gageure. L’image renvoyée par le pays était celle d’un pays se militarisant et se fragmentant sur des lignes claniques, tribales ou locales et sur fond d’absence d’autorité centrale, le tout éloignant la reconstruction d’un Etat et encore plus d’un Etat de droit. La Libye inquiétait.
Que pouvaient signifier les affrontements entre milices dans un contexte postrévolutionnaire où peinait à émerger une autorité centrale ? Le soulèvement libyen n’avait-il eu pour effet que de faire revenir sur le devant de la scène des tribus prenant leur revanche sur la ville et l’Etat moderne ?
Plus que cette résurgence des islamistes en Egypte, en Tunisie ou au Maroc, le «retour» des tribus en Libye ne venait-il pas signifier la fatalité de l’enracinement du monde arabe dans les liens de solidarité primordiale, le communautarisme et le traditionalisme, comme autant d’obstacles à sa sécularisation, et justifiant l’autoritarisme comme instrument de cohésion nationale ?
Le mouvement de contestation en Libye a émergé et s’est structuré sur une base civile, un ancrage dans la modernité, un large soutien de la population et une dynamique de dépa