La visite en France du président de la République tunisienne, Moncef Marzouki, qui s'achève demain, s'inscrit dans un contexte particulier : la gauche est de retour au pouvoir en France, tandis que la Tunisie s'est lancée dans un processus de transition démocratique. Cette double reconfiguration ouvre des perspectives inédites pour des relations bilatérales trop longtemps fondées sur des slogans artificiels - tel le fameux «miracle (économique) tunisien») - et/ou cyniques - «le régime de type autoritaire est l'unique rempart à l'islamisme». Ce type de discours a nourri l'incompréhension française. De l'immolation de Mohamed Bouazizi à la chute du régime de Bn Ali, la France n'avait pas su - voulu ? - prendre le train de l'Histoire. Pis, l'autisme et l'attentisme de Nicolas Sarkozy, conjugués aux propos de sa ministre des Affaires étrangères, Michèle Alliot-Marie, avaient suscité un malaise à l'égard de l'ex-puissance coloniale.
Malaise à peine estompé. Ainsi, il y a quelques mois, le président Marzouki n'avait pas hésité à pointer ce décalage : «La France est le pays le plus proche de la Tunisie et celui qui nous comprend le moins bien au sein de l'Europe. Est-ce la grille de lecture "religieuse" des Français qui les empêche de se rendre compte de ce qui se passe dans le monde arabe ?» (Le Point.fr, 17 mai). Le questionnement de cet homme de gauche invite à ne pas céder à l'obsession islamiste par une diabolisation stérile, à ne pas réduire la compl