AChurch Square, il a fallu fendre une foule compacte pour parvenir jusqu’aux marches du palais de justice de Pretoria. Puis une porte dérobée a permis de rejoindre discrètement les sous-sols, là où les avocats et les accusés avaient pris l’habitude de se retrouver pendant le procès qui s’est achevé aujourd’hui.
On ne connaîtra le verdict que dans trois semaines, le 11 juin. Mais l'homme qu'on va rencontrer sait déjà qu'il risque la peine de mort. Pour le gouvernement sud-africain, c'est un terroriste, un poseur de bombes. Il y a deux ans, une traque gigantesque avait été orchestrée pour l'attraper. Le «Mouton noir» comme l'appelait alors la presse a longtemps nargué la police. Puis, il s'est fait piéger sur une petite route de campagne. On l'a jugé et condamné une première fois. Il purgeait encore sa peine, quand le deuxième procès a commencé, en octobre. Cette fois-ci les accusations sont bien plus graves : «actes de sabotages, préparation d'une insurrection armée». C'est suffisant pour être pendu, surtout quand on est noir et activiste au pays du «développement séparé». En cette fin mai 1964, on l'autorise à s'exprimer, peut-être pour la dernière fois, devant quelques journalistes étrangers afin de soigner l'image démocratique du régime. De toute façon, la presse de son pays n'a plus le droit de mentionner ses propos. Il s'appelle Nelson Mandela, il est devenu en quelques années l'ennemi public numéro 1 pour le régime de l'apartheid.
Le voilà qui arrive, encadré par