Je me suis longtemps demandé comment je pourrais me déclarer solidaire avec les Pussy Riot. J’ai même écrit un petit texte que je voulais mettre sur mon site, avec une photo de moi, bouche couverte par un sparadrap ou sac en papier sur la tête. Je ne l’ai pas fait, d’une part parce que l’actionnisme n’est pas (n’est plus) mon truc, d’autre part parce que j’ai conscience du fait que je pourrais tout faire pour soutenir ces femmes alors qu’elles ne doivent pas pouvoir faire ce qui est de leur droit le plus strict : se produire en public dans une église (mon Dieu ! Et toi donc, sainte Vierge ! Nous nous connaissons depuis si longtemps, depuis l’école religieuse, déjà, alors dis-moi, sincèrement : est-ce que tu te sens profanée, maintenant ? Comment cela peut-il t’atteindre, Dieu de bonté, toi qui depuis toujours ne cesses de monter en puissance, quand les vedettes de la chanson, elles, sont en perte de vitesse dès qu’on cesse de s’y intéresser. Mais Dieu et sa mère, on peut s’y intéresser ou pas, il est toujours égal à lui-même, Lui, on ne peut pas l’insulter, il est l’Etre par définition, dont ont besoin les humains, qui, eux, ne sont pas l’Etre, mais lui appartiennent. Ce qui ne signifie pas qu’ils lui appartiendraient aussi, à lui, Dieu. Ils décident eux-mêmes à qui ils veulent appartenir. Ils sont juste posés là, ils disent ce qu’ils ont à dire, car au commencement était le Verbe, et le Verbe appartient à qui se l’approprie, et dès ce moment-là il lui appartient aussi. Un D
TRIBUNE
Pussy Riot : chanter, danser, crier
Article réservé aux abonnés
par Elfriede JELINEK, Ecrivaine, lauréate du Nobel de littérature 2004
publié le 4 septembre 2012 à 20h46
Dans la même rubrique