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TRIBUNE

Pourquoi les salafistes s’en prennent-ils aux mausolées soufis ?

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Le monde arabe en ébullitiondossier
par Jean-Yves Moisseron, Chercheur à l’Institut de recherche pour le développement, rédacteur en chef de la revue Maghreb-Machrek
publié le 6 septembre 2012 à 19h07

Après avoir détruit les bouddhas de Bamiyan, les tombeaux de grands saints de Tombouctou, les salafistes détruisent à présent des mausolées en Libye. De l’Afghanistan au Mali, une même rage vengeresse semble accompagner partout le triomphe de ces mouvements qui s’attaquent non seulement aux symboles de l’Occident mais aussi à ceux de l’islam traditionnel et du soufisme. C’est d’autant plus paradoxal que la charia interdit la profanation des tombes et que les visites pieuses dans les cimetières et notamment sur les tombeaux des saints font partie intégrante des actes de dévotion dans l’islam traditionnel. Mais qui sont ces salafistes ?

Il s'agit de mouvements inspirés de la doctrine du wahhabisme développée au XVIIIe siècle par le théologien Abdel Wahhab. Cette doctrine littéraliste et rigoriste a été adoptée et soutenue par Mohammed ibn Seoud, l'aïeul de l'actuelle famille régnante en Arabie Saoudite. Elle est donc devenue une doctrine officielle et un instrument idéologique utilisé pour exercer une influence sur le monde musulman. Elle a été fermement combattue par l'islam érudit des oulémas ainsi que par les théologiens soufis. Mais elle sert aussi à présent de paravent à des groupes violents et délinquants.

Ceux qui se désignaient comme wahhabites ont préféré récemment choisir le vocable plus honorable de salafistes (de l'arabe salaf, «ancêtre») évoquant les premiers temps de l'islam. Salafisme et wahhabisme sont donc issus de la même matrice, même s'il